« Le démon a le bras long. »
“And now an English, or Irish, or American song…I don’t know”.

Je viens enfin de ressortir un coffret de huit disques que j’ai acheté autour de Noël 2005…Un cadeau que j’ai gardé de côté pendant presque une année et demie. Ce coffret permet de parcourir une période qui couvre presque toute ma vie puisque les premiers concerts datent des premières années qui suivent la fin de la dernière guerre mondiale.
Dans le disque que j’écoute ce soir, les Frères Jacques présentent un récital en anglais…Le public apprécie et rit ; même quand ils entonnent « Barbara » « from the French poet Jacques Prévert. » : « Rappelles toi Barbara, il pleuvait sans cesse sur Brest…et je t’ai croisée rue de Siam, et tu souriais et je souriais de même. »
Et je me souviens soudain que Barbara, la chanteuse s’adressait d’une voix étouffée à son père : « Il pleut sur Nantes ». Autre port, tout aussi dramatique. « Madame, soyez au rendez-vous Vingt-cinq rue de la Grange-au-Loup… » « Je l’ai couché dessous les roses, mon père ».

Il faut sans doute parfois lever l’ancre après avoir cru toute une matinée que l’on commençait à naviguer.
Les boîtes à musique égrènent leurs notes…ce sont des mécaniques un peu fantastiques, magiques et mystiques, tantôt poétiques, tantôt sarcastiques…
Je me sens le droit de cette nostalgie soudaine ; je me souviens d’une salle de cinéma. J’avais une dizaine d’années sans doute. Les Frères Jacques étaient sur l’écran, chantant, parapluie en main, la Saint-Médard.

Dix années après, à Bobino peut-être, ils étaient dans le meilleur de leur forme devant moi, comme Barbara, Brassens ou Ferré. Un miracle.
Et le cirque avait posé son chapiteau…Et dehors il y a des enfants au sourire mélancolique. Cinquante années plus tard, les boîtes à musique et le moucheur de réverbère reviennent faire effraction au Luxembourg, dans une tour un peu irréelle.
Les Frères Jacques ont trouvé une clef qui doit certainement ouvrir bien d’autres coffres aux souvenirs.