Arts vivants, Identité européenne : Editorial

De 1997 à 2006, l’Institut Européen des Itinéraires culturels a accompagné et publié des Lettres d’information sur un des axes de travail les plus dérangeants pour le concept même d’itinéraire culturel, concept qui était resté jusqu’à la fin des années 90 essentiellement fondé sur le patrimoine et l’histoire: celui de la prise en compte des arts vivants comme outils de lecture de l’itinérance imaginaire et matérielle.

Il s’agissait, en choisissant les arts du geste et les arts visuels, transmissibles par l’émotion plutôt que par les discours, d’aborder des domaines visant une meilleure prise de conscience par les Européens de leurs racines culturelles communes, non seulement conceptuelles, mais aussi émotionnelles.

Dans un langage qui, après quinze années, peut paraître daté et utopique quand on lit les résultats des études de public publiées récemment par le ministère français de la culture, ces itinéraires cherchaient aussi « à décloisonner les pratiques culturelles et à donner la parole aux usagers de la culture. »

Il s’agissait bien selon les termes de Philippe Henry, universitaire d’une « volonté de prendre en compte les personnes et les oeuvres comme réalités singulières et irréductibles, mais aussi comme réalités parties prenantes et à les intégrer dans une collectivité sociale élargie« .

Il s’agissait enfin de prendre en compte à la fois des patrimoines européens, des lieux, textes et images, ainsi que des représentations qui ont marqué des étapes essentielles pour la culture du corps. Et ceci des arts de la scène aux arts visuels, de l’oeuvre d’art totale jusqu’au théâtre populaire. Puis de les confronter aujourd’hui entre Européens, praticiens et usagers, créateurs de profession et amateurs, à la réalité des lieux où se jouent les questions fondamentales de la citoyenneté et de l’altérité.

Cette vocation a connu ses heures de gloire et les projets pilotes ont été nombreux au sein de l’Académie des Arts du Geste – Des « Transversales », aux « Théâtrales pour les jeunes » à Bussang au  sein du Théâtre du Peuple ou d’un autre côté dans le Réseau des « Centres d’Art des Marges ». Il serait certainement temps d’en publier les archives, même si en 2006 le Conseil de l’Europe a décidé que les itinéraires fondés sur la coopération culturelle devaient disparaître de la Liste.

Le but de la série de posts qu’inaugure cet éditorial, n’est certainement pas de ressusciter ce qu’il va bientôt falloir nommer « l’époque expérimentale des itinéraires culturels« , mais de faire un tri au sein des événements artistiques européens, en mettant en valeur ceux qui semblent concerner la connaissance d’une identité européenne en partage, transmise par des artistes, comme par des commissaires d’expositions ou des responsables de festivals, dont le but n’est pas seulement d’interpréter des valeurs européennes, comme on le fait dans le discours sur le patrimoine, mais de les rassembler, de les cristalliser et d’en faire une œuvre qui, d’hier à aujourd’hui nous aide à mieux nous comprendre Européens.

Photographie : Théâtre du Peuple, Bussang, Vosges. Cliché J.M. Bodson

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