Dimanche 28 octobre 2007, Madrid, le goût de voyager

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En prenant des notes sur les épisodes galiciens et madrilènes, je constitue une sorte de millefeuilles de mon propre texte, que je ne souhaitais pas au départ si personnel, avec des phrases, des pensées, des textes d’humour et des anecdotes de Cees Nooteboom.  

Cet homme, que j’imaginais toujours jeune quand je l’ai invité en 2000 et en 2007, mais qui ne l’est plus vraiment. Cet homme qui m’a tout de même cette fois-ci répondu de sa main sur un papier aux armes d’un grand hôtel allemand et avec un timbre d’îles espagnoles, qu’il ne pourrait être libre en raison de conférences aux Amériques, me procure beaucoup de voies d’entrées pour mes propres confessions et parfois des métaphores dont j’ai besoin pour me dissimuler. 

Je ne sais pas si cet auteur vient me tirer par les pieds  parce qu’il a parcouru l’Espagne à plusieurs reprises. Il s’imagine dans l’un de ses romans, attaqué grièvement dans la nuit madrilène et poursuivant l’ombre de son amour trop jeune à Santiago.  

Cela sans doute peut m’aider dans les aspects imaginaires de moments sensibles, mais je sais que son goût du voyage, sa vie peuplée de chambres d’hôtels et son extraordinaire fascination pour les rapports entre la mémoire – et surtout son absence, ses trous – et la création littéraire, en font pour moi un modèle.  

Je n’ose pas dire un double, ce serait bien entendu immodeste, même si, à part moi, j’adore ce fantasme. 

Le livre qui m’a accompagné ces jours-çi accumule des textes qui n’ont pas de rapport entre eux, sinon la personnalité de l’auteur et un certain regroupement thématique : « l’art des voyages », » les voyages de l’art », ou encore « écriture, mémoire ». Cela arrive parfois dans les recueils. Etait-ce une des conditions parfois étranges des contrats d’auteurs ou une bataille entre deux éditeurs. Je ne sais. Peut-être juste un hasard.

Mais voilà, c’était ma fête. On sait que j’aime Nooteboom et j’ai reçu ce livre le dernier jour du Puy-en-Velay de la part de quelqu’un qui le sait. Je l’en remercie. 

Il m’a accompagné durant des semaines difficiles et il m’a réellement aidé.  

Il a joué un rôle essentiel : soigner les plaies du corps. Celles de l’âme ne se soignent pas trop ; elles vous entraînent bien plus sûrement  vers la mort. 

Je retrouve de jolies choses ; un magnifique portrait de Paris écrit en 1977 à un moment où je n’imaginais peut-être même pas écrire, mais où je savais déjà que des couches de la capitale s’accumulaient en moi. 

Etrange chose que la ressemblance. Elle m’a déjà joué bien des tours en me happant dans des vies parallèles, dans des mondes où je n’avais qu’une boussole et pas de clefs. 

J’aurais aimé être un aussi bon et lumineux critique d’art que ceux que je lisais du temps où j’écrivais chaque trimestre sur l’art textile.

J’aurais aimé qu’on me dise que j’avais su faire une exposition séduisante dont la didactique perçait sous le design.

J’aurais aimé être celui qui décrit la place de la nature entre les pierres et qui sait célébrer l’inéluctable du sauvage. 

J’aurais aimé être celui qui oriente un projet européen jusqu’à ce qu’il devienne indispensable.  

Et de tout cela et de chacune de ces activités, j’aurais pu me satisfaire et en recevoir la gloire qu’au fond j’aime tant. 

Mais de tout cela, je n’ai su faire qu’un mélange, pas très bien venu, où je me suis simplement exposé, souvent en tête, devant, sans véritable justification à cacher les vrais professionnels. 

Imposteur autrement dit. 

Il faut bien vivre avec et le reconnaître honnêtement. 

Revenir vers la mémoire, c’est cela aussi.

Mais à vrai dire je n’ai rien commencé à raconter.

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